Sound of silence

Ce soir, j'ai expérimenté une expérience traumatisante : la mort de ma carte son. Plus de casque, plus de haut-parleurs, plus aucun moyen de capter ne fut-ce qu'un petit bip énervant montrant l'agonie de mon ordinateur : the sound of silence. Comme le disait Doctor Who, « un grand silence s'est abattu ». Et là, le drame : Pachinko sans le son, Heirs en mute, Go Jun Pyo montrant son execrable caractère sans ces délicieuses répliques dont il a le secret (quoi, elles sont en coréen de toute manière et il y a toujours les sous-titres ? Vous savez combien il est frustrant de ne plus entendre la voix chaude de Lee Min Ho et de devoir se raccrocher à ses souvenirs ? Traumatisant, on vous dit. )

Et puis, je me suis rendu compte que même sans le son, on comprend pas mal de choses tant les acteurs sont expressifs et je me dis : dans leurs écoles d'acting, peut-être qu'on apprend aussi à jouer sans le son ? Pour les sourds et les cartes sons moribondes ?

Ce qui doit donner à peu près ça.

Séoul, 7/06/2022

Ku Jin, professeur de comédie ; ….

Gu Ku, élève (chuchote) : Qu'est-ce qu'il a dit ?

Hu Ju (autre élève) : Rien... C'est ça l'exercice : jouer sans le son...

-Sans le son... sans le son... Okay... Mais sans le script... C'est un peu chaud quand même....

-(murmure agacé dans la salle) : Chuuuttt !!!!

-Bon... Et qu'est-ce qu'on doit jouer ?

-Ça y est ! Il nous l'explique !

Geste du professeur qui vient de faire un grand cercle avec ses deux bras...

-Okay... ? C'est … Un gros câlin ? On joue les bisounours ? L'infini ? On est des cosmonautes ?

-Tais-toi un peu … ! C'est évident !

-On n'a pas droit à un papier ? Comme à Pictionnary ?

-Non ! Ça y est ! Il t 'appelle, c'est ton tour !

Gu Ku, peu rassuré se rapproche. Le professeur fronce les sourcils...

-Euh... Je dois faire quoi ? Essayons le désarroi... ?

Air mécontent du professeur.

-Euh, la tristesse ?

Air carrément furieux...

-Le jeu du miroir ? Je fais pareil ? Il me montre les dents, je fais pareil comme dans les combats de singe ? C'est un retour aux instincts primordiaux ?

Geste agacé du professeur qui le renvoie à sa place.

-Hu Ju (chuchote) : Tu es fou d'avoir tenté ça !

-Tenté quoi ?

-De faire quelque chose !? L'exercice consistait à ne rien faire...

-Okay mais pourquoi il a l'air furax avec celui-ci qui ne fait rien ?

-Parce qu'il ne fait rien.

-Mais c'est ce qu'on lui demande !

-Il faut qu'on voit qu'il ne fait rien ! C'est à la portée du premier venu de ne rien faire mais seul un acteur peut ne rien faire sans qu'on ait l'impression qu'il ne fait rien...

-Okay... Et l'exercice là ?

-Il faut faire le strict minimum...

-Mais il ne fait rien non plus celui-ci ?

-la frontière entre ne rien faire et faire le minimum est ténue car après tout, peut-on faire moins que rien ?

-C'est un cours de philo ?

-De positionnement par rapport à son soi profond afin que la caméra puisse saisir l'essence de l'acteur même s'il ne peut se reposer sur sa voix...

-Sûr qu'avec un cours pareil, la petite sirène aurait gagné le bachelor...

-Quoi ?

-Rien... Bon, alors, il ne faut rien faire, l'air de rien, en évitant d'en faire trop en voulant faire le minimum qui est plus que rien...

-Exactement...

-Et si on veut exprimer quelque chose ?

-On fait pile le contraire !

-On fait quelque chose qui se voit en faisant le maximum...

-Mais sans en faire trop...

-Mais sans toucher le minimum …Et si on se retrouve à jouer un type qui en fait trop et qui subitement tombe dans les pommes ?

-Il faut s'évanouir et syncoper de manière expressive et dynamique...

-Finalement, je crois que j'ai la solution...

-Laquelle ?

-Faire des économies sur les cours d'acting et transférer les fonds aux unités de recherche en électronique afin d'améliorer la qualité des appareils auditifs et celle des cartes sons... »

Samsung a encore de beaux jours devant lui...

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